03/12/2013 Réflexions : Au SUJET De......................











Par François Soudan

Fin octobre, 52 enfants sont morts de soif dans le nord du Niger. © AFP

Le dimanche 3 novembre, lendemain de l'assassinat de nos deux confrères de RFI non loin de Kidal, avait été déclaré jour de deuil continental par l'Union africaine. Non pas en hommage à Ghislaine Dupont et Claude Verlon, mais à la mémoire des 350 victimes anonymes de la tragédie de Lampedusa, noyées aux portes de la forteresse Europe. Mauvaise pioche : un dimanche d'abord et un dimanche submergé par le torrent d'émotion médiatique qu'a suscitée à juste titre la disparition des deux journalistes français. Résultat, pas une ligne, pas un écho sur ce non-événement à propos duquel il n'y avait d'ailleurs rien à dire, puisque les recommandations de l'UA - mise en berne de tous les drapeaux et minute de silence dans tous les lieux publics - sont partout passées inaperçues.

Quelques jours avant le drame de Kidal

92 corps décomposés, à demi dévorés par les chacals, ont été retrouvés à la frontière nigéro-algérienne, morts de soif à quelques kilomètres d'un puits. Parmi eux, 52 enfants qui tous serraient dans les replis de leurs chemises les Corans et les tablettes des talibés. Sans doute l'effectif au complet d'une école coranique du sud du Niger venu mendier en Algérie, là où l'aumône permet encore de survivre.

L'un des deux camions qui les transportaient pour le compte d'un réseau de trafiquants établi entre Tamanrasset, Arlit et Agadez, et dont les liens avec les katibas jihado-mafieuses sont connus, était tombé en panne. Le chauffeur est alors monté à bord du véhicule en état de marche, lequel, après s'être délesté de sa cargaison humaine, aussitôt remplacée par les jerricans d'eau potable disponibles, a fait demi-tour afin d'aller chercher les pièces détachées nécessaires à la réparation. Il n'est jamais revenu. La suite, l'errance, la souffrance, l'agonie et la découverte le 31 octobre par une patrouille de secours des petits cadavres momifiés, relève de l'indicible.

Cette hécatombe n'a fait la une d'aucun JT

Ni donné lieu au moindre communiqué du Conseil de sécurité de l'ONU.
Seul le Niger a décrété trois jours de deuil national, dans l'indifférence quasi générale. 

Comment ne pas faire la comparaison ?

D'un côté un président, une Assemblée nationale et des médias français communiant dans la douleur des familles des victimes et de leurs collègues touchés au cœur. De l'autre ces chefs d'État africains, prompts à présenter leurs condoléances - et même à écraser une larme - pour le décès de ces deux professionnels étrangers victimes d'un devoir d'informer dont ils n'ont généralement cure, mais que le sort de 52 gamins naufragés des sables laisse manifestement impassibles.
Dans ce Sahel rendu fou par l'argent des rançons et des trafics, parcouru de bandes barbares, où preneurs d'otages, tueurs de journalistes et contrebandiers d'enfants échangent constamment leurs rôles, les morts n'ont pas tous la même valeur. Une dichotomie qui n'aurait certainement pas échappé à Ghislaine Dupont.


Seidik Abba, envoyé spécial à Bamako

Assassinat de deux journalistes, libération des otages d'Arlit, négociations difficiles avec les Touaregs... Au Mali, IBK est fragilisé sur son territoire tandis que son voisin nigérien, Mahamadou Issoufou, apparaît comme l'homme fort d'une région livrée aux bandes barbares rendues folles par la surenchère des rançons.
La question touarègue. Avant même d'être élu, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) savait qu'elle s'imposerait à lui bien assez tôt. Il savait aussi qu'il serait trop souvent court-circuité sur ce dossier. Que la France, longtemps complaisante avec la frange indépendantiste représentée par le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), mais aussi l'Algérie et le Niger, deux pays directement impactés par les remous du Nord-Mali, continueraient de jouer un rôle parfois trouble. Deux événements, l'un heureux (la libération dans le nord du Mali de quatre otages français), l'autre tragique (l'enlèvement et l'assassinat à Kidal de deux journalistes français), l'ont confirmé ces derniers jours, à quelques semaines des élections législatives prévues le 24 novembre.

Alors il a haussé le ton. "Il faut mettre un terme à la situation à Kidal. On ne saurait la tolérer plus longtemps !" a-t-il tonné le 5 novembre à Bamako, lors d'une réunion ministérielle sur le Sahel. Déjà, lors du huis clos entre les chefs d'État de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao), le 25 octobre à Dakar, il avait interpellé ses homologues en des termes similaires. Le président ivoirien, Alassane Ouattara, s'est alors tourné vers Blaise Compaoré, médiateur dans la crise malienne : "Que proposez-vous ?" Surprise du chef de l'État burkinabè : "Il y a certes un problème de l'Azawad, mais c'est un problème malien, qui doit être réglé entre Maliens"... IBK a vu rouge. "Il n'y a pas d'Azawad au Mali ! Le problème, c'est le MNLA, à Kidal !"

>> À lire aussi : Kidal, ville (presque) ouverte

En colère, le président malien l'est. Lui qui a été élu sur la promesse de rétablir la dignité du Malien s'est vu, en moins d'une semaine, court-circuité par deux fois lors d'opérations sur son propre territoire - comme Amadou Toumani Touré en son temps. D'abord lors de la libération des otages d'Arlit, le 29 octobre. Affaire directement gérée par Niamey et Paris. Les négociateurs nigériens, arrivés quelques jours plus tôt sur le sol malien, ont récupéré les quatre Français sans aucune participation des autorités maliennes.
Selon une source proche d'IBK, il n'a pas été informé - ou s'il l'a été c'est au dernier moment - qu'un hélicoptère de l'armée nigérienne s'apprêtait à se poser sur le sol malien. "On aurait préféré être informés avant", glisse cette source. Le Mali, pour faciliter les négociations, avait pourtant levé les mandats d'arrêt internationaux lancés contre plusieurs chefs rebelles Touaregs, parmi lesquels Alghabass Ag Intalla et Ahmada Ag Bibi, deux lieutenants d'Iyad Ag Ghali, le chef du groupe djihadiste malien Ansar Eddine qui aurait joué un rôle déterminant dans la négociation. Le goût est amer.

À peine le temps de ravaler son orgueil que le locataire du palais de Koulouba se retrouve brutalement confronté à l'assassinat, le 2 novembre à Kidal, de Ghislaine Dupont et de Claude Verlon, deux reporters de RFI. Le commanditaire présumé de cette opération, Abdelkrim al-Targui (Abdelkrim le Touareg), chef d'une katiba d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) - qui a revendiqué les faits le 6 novembre -, est issu de la tribu touarègue Ifoghas (comme Ag Ghaly). Il est aussi à l'origine du rapt, au mois de novembre 2011, des Français Philippe Verdon (retrouvé sans vie en juillet) et Serge Lazarevic, toujours retenu dans le désert.


Aucune autorité malienne n'est intervenue dans les arrestations de suspects

Aux larmes versées devant les dirigeants de France Médias Monde deux jours après la macabre découverte, succède la rancœur. Non seulement IBK est persuadé que ce drame ne serait jamais arrivé si la France avait laissé l'armée malienne sécuriser Kidal, mais, en outre, les Français le mettent une fois de plus à l'écart ! Tout juste les gendarmes maliens ont-ils été associés aux premiers constats, sur la scène du crime.

Paris, qui a ouvert une information judiciaire pour "assassinat en relation avec une entreprise terroriste", confisque la suite de l'enquête : les limiers débarqués de l'Hexagone le 4 novembre au soir sont accueillis au pied de l'avion par un gendarme de l'ambassade de France... Les officiels maliens sont absents du tarmac de l'aéroport de Bamako-Sénou, et du salon d'honneur, que les enquêteurs quittent très vite pour se rendre sur le terrain.

Rapidement identifiés, les suspects sont arrêtés par les militaires de Serval, et transportés à Gao pour y être interrogés. Aucune autorité judiciaire malienne n'est intervenue dans la procédure, depuis leur détention jusqu'à leur remise en liberté.
"Tout cela est très gênant pour IBK, explique un analyste politique. C'est un sacré dilemme : il ne veut rien faire qui puisse apparaître comme de l'ingratitude envers la France et sa décision d'intervenir le 11 janvier. Mais il ne veut pas non plus donner aux Maliens l'impression que le pays n'a pas son mot à dire sur des événements qui se passent ici."
Surtout, le président malien sait qu'il a encore besoin des forces françaises pour maintenir la pression sur les groupes terroristes et assurer la sécurité dans le septentrion de son pays.

L'armée malienne, censée prendre le relais de Serval, n'est pas encore opérationnelle. Deux bataillons de 700 hommes chacun ont certes été formés par la Mission européenne de reconstruction de l'armée du Mali (EUTM, en anglais). Et un troisième sur les quatre prévus est en cours de formation. Ce sont donc près de 2 800 hommes que l'UE aura formés à la fin de sa mission. Au-delà de ce nombre peu important pour le Mali, l'un des plus vastes pays d'Afrique subsaharienne, le comportement de l'armée malienne sur le terrain est sujet à caution.

Le bataillon Elou, le tout premier encadré par l'EUTM, avait refusé de se présenter à la cérémonie de sortie de formation, en raison des problèmes de prime et de promotion. Le second bataillon a été rappelé lundi 4 novembre à Bamako à la suite d'une "bavure" contre trois vieux notables Touaregs qui se rendaient à des négociations avec le pouvoir. Battus et torturés, deux d'entre eux sont toujours entre la vie et la mort.

Sur le terrain, l'armée malienne rencontre des difficultés opérationnelles. C'est Serval qui fait le plan des patrouilles et conduit les opérations de sécurisation. Les problèmes de prime, de discipline et de promotion persistent dans les rangs.
S'y ajoute la fracture entre les Bérets verts du général Amadou Haya Sanogo et les Bérets rouges restés fidèles au président Amadou Toumani Touré, renversé le 22 mars 2012. Malgré une réconciliation formelle obtenue difficilement par le président de transition, Dioncounda Traoré, les deux composantes de l'armée malienne ont du mal à s'entendre. Des blessures ne sont pas encore cicatrisées : on reste toujours sans nouvelles du colonel Youssouf Traoré, victime présumée parmi d'autres des règlements de comptes entre militaires maliens, dont celui de la nuit du 30 septembre au 1er octobre, au camp militaire de Kati.

Kidal fut la première mission commune de Ghislaine Dupont et Claude Verlon.
 
C'était au mois de juillet, et de la ville du Nord-Mali, ils avaient saisi des instantanés pour l'Histoire.
Ils s'étaient si bien trouvés, elle la journaliste au franc-parler, lui, le technicien à l'âme généreuse,
qu'un de leurs amis et collègues de RFI les avait surnommés, après leur retour, "les mariés de Kidal".

Ils ne savaient pas que ce serait pour le meilleur et pour le pire.
© Jean-Marc et Sarah Tisseyre/RFI

La Minusma n'assure que le service minimum

Pour des raisons différentes, la situation des troupes de la Mission des Nations unies pour la stabilisation du Mali (Minusma) n'est guère plus brillante. Sur les 12 000 hommes attendus, moins de la moitié sont pour l'heure sur le terrain. Ils sont même moins nombreux que lorsque la Minusma a succédé à la Mission internationale de soutien au Mali (Misma), le 1er juillet. Car non seulement les Nations unies n'arrivent pas à convaincre des pays d'envoyer des troupes, mais en plus le Nigeria, qui jouait un rôle important au sein de la force déployée par les États de l'Afrique de l'Ouest, a retiré une partie des siennes.

Trop peu nombreux, les Casques bleus manquent aussi de moyens logistiques et dépendent en grande partie de l'opération Serval pour l'intendance et la mobilité. À Kidal, ville tenue par les Sénégalais du colonel Guiran N'Diaye, la Minusma n'assure que le service minimum : escortes des délégations officielles, protection du personnel onusien. Avec l'armée malienne, elle n'a pu conduire aucune grande opération d'envergure contre les djihadistes sans le soutien des forces françaises.

En attendant la consolidation de ses moyens militaires, le gouvernement du président IBK court après une réponse politique au problème du Nord. Et ne l'a pas encore trouvée. Le MNLA, le Haut Conseil unifié de l'Azawad (HCUA) et le Mouvement arabe de l'Azawad (MAA), qui négocient actuellement à Ouagadougou et qui tentent de se regrouper dans une plateforme commune, estiment que le pouvoir ne va pas assez loin dans ses concessions. En revanche, une partie de la population qui a voté IBK sur sa promesse de fermeté et d'intransigeance sur la question du Nord crie déjà sa déception.
À Koulouba, si l'on admet que certains dossiers hérités de la transition gênent le début du mandat, on préfère dédramatiser. Le président IBK n'a-t-il pas réussi à déloger, sans difficulté, l'ex-putschiste Sanogo de sa "république de Kati", et à le ramener dans une villa du quartier du fleuve Niger ?

Dans l'entourage du chef de l'État, on insiste également beaucoup sur le parallèle avec le Mali de 1994. Alors chef du gouvernement du président Alpha Oumar Konaré, il avait rétabli l'autorité mise à mal par des mouvements sociaux. Mais cette fois-ci, ce ne sont pas des étudiants en colère qui lui font face, mais des groupes armés djihadistes avec lesquels le dialogue est impossible, des mouvements irrédentistes Touaregs, et un rapport diplomatique compliqué avec la France.


Niger : Mohamed Akotey, profession négociateur

À dix reprises, Mohamed Akotey rencontre Abou Zeid, le tueur d’Aqmi. © DR
Ancien ministre, directeur de la filiale du groupe nucléaire français Areva, cet homme discret a su gagner la confiance des Touaregs et des autorités nigériennes et françaises. Mais que sait-on au juste de Mohamed Akotey ?

De Mohamed Akotey, héros discret de la libération des otages d'Arlit, les Nigériens disent qu'il a eu plusieurs vies. Toutes dictées par des circonstances exceptionnelles. Jeune étudiant en géographie à l'université de Niamey, la vie de cet homme de 46 ans originaire du village de Tidène, dans la région d'Agadez, bascule une première fois lorsqu'il quitte son pays dans les années 1990 pour poursuivre des études d'archéologie en France, grâce à une bourse de la coopération française obtenue par sa famille. Le 15 décembre 1995, un événement inattendu interrompt son cursus et change totalement sa vie : son oncle Mano Dayak, cofondateur avec Thierry Sabine du rallye Paris-Dakar et figure emblématique (surtout en France, où les médias en ont fait leur coqueluche) de la rébellion touarègue qui a éclaté cinq ans plus tôt, décède dans un tragique accident d'avion dans les montagnes du Nord-Niger alors qu'il se rendait à Niamey pour un nouveau round de négociations. Il faut vite trouver un nouveau chef, emblématique comme Mano Dayak, capable de fédérer une rébellion minée par les divisions et de laisser la place aux autres quand viendra le moment de toucher les dividendes de la lutte. Un leader capable aussi de tact et de fermeté avec les autorités nigériennes. Akotey a le profil de l'emploi. "Ce n'est pas un va-t-en-guerre. C'est un intellectuel. Un homme qui ne parle pas beaucoup, mais en qui on peut avoir confiance. Il est calme, réservé et correct", dit de lui un autre médiateur sahélien.
Pressé par la famille, Akotey prend ainsi la tête de la Coordination de la résistance armée (CRA), fondée par son oncle. Il hérite aussi de ses réseaux parisiens dans la diplomatie, le showbiz, les médias et les services secrets. Continuité familiale, pas stratégique : Akotey rejoint le processus des "accords de paix définitive" le 25 octobre 1995 à Niamey, signés le 24 avril de la même année par la plupart des groupes rebelles mais rejetés par son oncle. Il réussit aussi à mettre fin à la querelle de leadership avec Rhissa Ag Boula au sein de la communauté touarègue, allié puis rival de Mano Dayak.
C'est un Ifogha, comme Iyad Ag Ghali, chef du mouvement islamiste malien Ansar Eddine qui jouit, dans cette communauté, d'une immense aura. Leurs destins ont pris des voies différentes, mais ils se respectent. 

Nommé ministre de l'Environnement et de la Lutte contre la désertification
 

Au lendemain de la signature des accords de paix, les chefs rebelles obtiennent tous des strapontins ou des compensations financières : Rhissa Ag Boula, Mohamed Anako, Mohamed Ag Aoutchiki Kriska, Issa Lamine... Tous, sauf Mohamed Akotey, qui choisit de retourner dans l'ombre pour cultiver patiemment ses réseaux dans sa communauté. C'est un Ifogha, comme Iyad Ag Ghali, chef du mouvement islamiste malien Ansar Eddine qui jouit, dans cette communauté, d'une immense aura. Leurs destins ont pris des voies différentes, mais ils se respectent. D'Iyad, Akotey disait il y a quelques mois qu'"il ne combattra jamais Aqmi [Al-Qaïda au Maghreb islamique], car ce sont des musulmans, comme lui". Il assurait aussi qu'à aucun moment il n'avait détenu les Français.
La vie de l'ancien étudiant en archéologie prend un nouveau tournant lorsqu'en 2007 le président nigérien Mamadou Tandja le nomme ministre de l'Environnement et de la Lutte contre la désertification. Il n'a alors pas de mots assez durs pour dénoncer la nouvelle rébellion touarègue, "injustifiée" car menée par "des petits bandits". Il profite de son poste pour construire des puits pastoraux dans le nord du Niger et accompagner le développement du secteur de l'élevage. Des initiatives qui renforcent sa crédibilité auprès des autres Touaregs, bien au-delà des seuls Ifoghas. Bien que francophile, Akotey obtient définitivement le statut de "notable touareg". Il a mûri, arbore une calvitie et préfère le turban bleu au costume-cravate. Un véritable chef touareg.

Mohamed Akotey, la coqueluche des médias français


En 2008, il démissionne de son poste de ministre pour devenir président du conseil d'administration d'Imouraren SA, une société nigérienne détenue à 58 % par le groupe nucléaire Areva, mise sur pied pour exploiter la très prometteuse et très convoitée mine d'uranium d'Imouraren. En redoutable tacticien, il sait que la gestion de cette matière première ouvre des portes à Paris, dans les milieux économiques, politiques et dans la communauté du renseignement. Lorsque le président nouvellement élu, Mahamadou Issoufou, à la suite de Salou Djibo, le confirme dans son rôle officieux de médiateur nigérien pour la libération des otages d'Arlit, personne ne trouve à y redire. Ni à Paris, ni à Niamey, ni même à Ouagadougou.
Sa première mission dans le Nord-Mali, Akotey la mène en octobre 2010, à peine deux semaines après l'enlèvement des sept otages d'Areva. Il rencontre, le 18 octobre, grâce à ses réseaux touaregs, l'émir d'Aqmi Abou Zeid dans l'Adrar des Ifoghas, et il lui parle sans sourciller, les yeux dans les yeux. En juillet, il ramène des preuves de vie des quatre otages restants (sur les sept enlevés). "Le dénouement approche", a-t-il glissé à ses proches et à ses contacts français avant de finaliser, le 27 octobre, leur libération.
Ce jour-là, son destin a une nouvelle fois basculé. L'homme de l'ombre timide et besogneux est devenu la coqueluche de la presse française. Lui se serait bien passé d'une telle publicité. Après avoir ramené les otages à Niamey, il s'est discrètement éclipsé. Depuis, il refuse de parler aux journalistes. La gloire, c'est bon pour les autres.


La libération des quatre otages français du Sahel laisse la place à de multiples questions. 

Sécuriser le Sahel: mission impossible ?
Des représentants de 17 pays sont attendus,  novembre 2013, à Rabat pour participer à la Conférence sur la sécurité des frontières dans la zone sahélo-saharienne. L'objectif est d’amorcer une réponse coordonnée aux défis suivants : terrorisme, trafic d'armes, trafic de drogue, immigration clandestine.
Le Sahel n’est pas devenu la région de tous les trafics. Zone d’échange depuis qu'il existe des sources écrites, la bande sahélo-saharienne a toujours abrité différents types de commerces, que l’on classifie aujourd’hui, notamment depuis la création des frontières, de légal ou d’illégal, avec des populations qui sont habituées à transporter des marchandises librement. Et c’est toujours le cas, puisque ces frontières sont très largement incontrôlées.

Difficile de contrôler les frontières

Judith Scheele, anthropologue à l'université d’Oxford en Grande-Bretagne a passé seize mois entre le sud algérien et le nord du Mali à circuler avec des transporteurs, fraudeurs ou non. Elle estime que l’idée de fermer les frontières à tout type de trafic est extrêmement difficile à mettre en œuvre. « On peut encourager les forces de l'ordre de la région à être plus vigilantes, cela voudra dire plus de corruption, mais pas moins de déplacements », explique-t-elle, ajoutant que rien n’empêchera véritablement ces populations de passer. Cela pourrait être même contreproductif. « S’il y a plus de surveillance, les gens vont payer plus cher les forces de l'ordre pour pouvoir passer », poursuit l’anthropologue Judith Scheele.
« Ceux qui font de la fraude sérieuse, comme les trafiquants de drogue, auront les moyens de continuer. Et ce seront les pauvres qui font du trafic de pâtes et de couscous qui seront pénalisés ».

Or, les populations vivant dans le Sahel sont déjà très largement paupérisées et survivent essentiellement grâce à la fraude ou aux trafics. L’auteur de Smugglers and Saints of the Sahara, édité aux Presses Universitaires de Cambridge en 2012, explique qu’au sein même des familles, chaque membre peut mener sa propre activité, frauduleuse ou non. Les jeunes sont attirés par le trafic de drogue, car c’est un moyen rapide d’obtenir son premier pick-up ou de se marier. Plus tard, ils auront tendance à choisir des activités moins risquées.

Rivalités et méfiance entre les pays riverains

Il y a la rivalité entre les deux pays du Maghreb qui entendent jouer un rôle dans la sécurisation de l’espace sahélo-saharien : le Maroc, qui organise cette conférence de Rabat, et l’Algérie, qui a refusé d’y participer, sur fond de tensions autour de la question du Sahara occidental.
L’absence de l’Algérie est déjà un problème majeur pour le succès de cette réunion tant ce pays est incontournable quand il s'agit de parler de sécurisation du Sahel.

Pour Medhi Taje, professeur de géopolitique, c’est la puissance régionale « qui ne peut qu'avoir un rôle extrêmement important relatif à la sécurisation des frontières, à la fois sur le plan militaire, mais aussi sur le plan économique et sur le plan humain » et notamment par sa proximité géographique avec le Mali. « L'Algérie partage une frontière de 1 300 à 1 400 kilomètres avec le nord du Mali avec des populations qui sont imbriquées de part et d'autres. Des liens qui sont donc extrêmement étroits », poursuit cet expert auprès de l'Institut tunisien des études stratégiques, ajoutant qu’Alger avait développé une stratégie de « pompier pyromane ». Ce qui entraîne une méfiance de nombreux pays de la région et notamment des riverains du sud.
« De nombreux responsables sécuritaires de pays sahéliens ne le cachent pas en privé, mais ne le disent pas publiquement parce qu’ils ont peur des mesures de rétorsions, compte tenu justement de sa capacité de nuisance », explique Mehdi Taje. « Dans l’Etat profond algérien, différents clans sont en lutte pour l’accaparement de la richesse pétrolière algérienne, pour la mainmise sur les trafics ou sur le pouvoir politique ». Et certains de ses clans, poursuit ce professeur de géopolitique tunisien, ont des liens avec des groupes comme Aqmi ou Ansar Dine, le groupe dirigé par le touareg malien, Iyad Ag Ghali.

Un manque de volonté politique manifeste

L'Algérie n'est pas le seul pays pointé du doigt.

La Libye, depuis la chute de Mouammar Kadhafi, reste un « grand marché d'armes à ciel ouvert », estime Matthieu Pellerin, chercheur associé à l'Institut français des relations internationales (IFRI). Un Etat quasi inexistant, des milices qui règnent en maître et dans le sud du pays, des groupes terroristes qui profiteraient de ce chaos pour s'y installer, comme l’ont très souvent dénoncé ses voisins du sud, le Tchad et le Niger.

Mais pour Matthieu Pellerin, tous les pays de la région manquent de volonté politique pour lutter contre les réseaux criminels au Sahel. « On voit bien que ces réseaux sont protégés », explique-t-il.
« Aujourd'hui, vous avez des narcotrafiquants notoires, notamment au Mali, certains ayant des mandats d'arrêt sur leur tête qui continuent de circuler librement dans la région ». Cette absence de volonté politique s’explique, selon plusieurs experts sur le Sahel, par les liens incestueux qu’entretiennent les pouvoirs locaux ou nationaux avec les trafiquants. Matthieu Pellerin estime également qu’il y a dans les pays riverains du Sahel une « absence de capacité manifeste ». Manque de moyens financiers, de personnel formé et des frontières à contrôler de milliers de kilomètres, autant de handicaps qui s’ajoutent pour mettre en place une surveillance efficace.
 

Libération des otages  Les coulisses d’une opération périlleuse
Quelles sont les personnes qui sont intervenues pour obtenir que leurs geôliers les relâchent, où ont-ils été libérés, comment s’est déroulée l’opération et une rançon a-t-elle été versée ? Autant d’interrogations auxquelles on commence à apporter quelques réponses pour tenter d'y voir un peu plus clair.
On l’a entendu sur l’antenne de RFI, le grand-père de l’ex-otage Pierre Legrand regrettait que la captivité de son petit-fils et de ses compagnons ait été si longue. Pour l’expliquer, il mettait en cause une lutte entre les services français. Dans son édition datée de jeudi et qui paraît aujourd’hui 30 octobre, le quotidien Le Monde confirme ces soupçons. 

Absence de résultats

En décembre 2012,  « l’Elysée ordonne à la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) de débrancher un négociateur français qui tient alors encore le haut du pavé après avoir fait libérer en février 2011, les trois premiers otages d'Arlit. Jean-Marc Gadoullet, ex-DGSE reconverti dans la sécurité au Niger et au Mali, met en avant ses contacts avec le groupe de ravisseurs dirigé par l'émir Abou Zeid. Mais l'absence de résultats et le déficit croissant de confiance signent sa mise hors-jeu », explique le journal. Il bénéficiera cependant d’une courte prolongation jusqu’au 10 janvier 2013, alors que l’opération militaire française Serval est lancée contre les djihadistes du Mali, ce qui bloque tout.

A propos du versement d’une rançon, alors que Paris maintient n’avoir rien payé aux preneurs d’otages, Le Monde décrit « une opération de récupération de huit jours, une rançon et des mois de négociations » qui auront été nécessaires pour aboutir au résultat que l’on sait. Est ensuite décrite par le menu, l’opération menée à l’extrême nord-ouest du Mali, près des frontières mauritanienne et algérienne.
Dix-huit hommes, des Français et des Touaregs répartis en plusieurs voitures, sans aucun moyen de communication pour ne pas être repérés, et porteurs d’une somme de 20 millions d’euros remis par des hommes de la DGSE la veille de leur départ de Kidal, foncent vers le point de rencontre fixé. Partis le 21 octobre, ils reviennent avec ceux qui sont désormais d’anciens otages, le 29 octobre.

« Il faut payer »

Du côté des négociations, rien n’a pu être repris avant le mois de mai alors que l’opération Serval se poursuit au Mali. Le contexte a changé tout comme la direction de la DGSE et c’est maintenant le ministère de la Défense qui reprend la main et choisit un plan d’action proposé par la société de sécurité Amarante. Son président
Pierre-Antoine Lorenzi forme une « équipe » avec Mohamed Akotey, proche du président Issoufou et neveu d’un ex-chef rebelle touareg. Il a le contact avec Abou Zeid le chef d’Aqmi et, après la mort de ce dernier, il le conservera avec ses lieutenants. C’est Mohamed Akotey qui dirige le convoi qui récupérera les quatre otages.

Les tiraillements entre les services français ne cesseront qu’à partir du moment où le président nigérien Mohamadou Issoufou, sûr de l’avancée des discussions, s’adresse à son homologue français pour lui donner les points de l’accord. Le Monde résume ainsi leur échange : « On peut les sortir, mais il faut payer ». « François Hollande donne son accord, poursuit le quotidien, contredisant ses déclarations devant les familles des otages d'Arlit en janvier auxquelles il assurait que la France ne paierait plus ». Selon les informations dont dispose Le Monde, l’argent versé pour la libération des otages « a été prélevé sur les fonds secrets alloués aux services de renseignement ».
  
Les otages français au Sahel et leurs ravisseurs écoutaient RFI
Comme Ingrid Betancourt dans la jungle colombienne ou les journalistes Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier durant leur captivité en Afghanistan, certains des otages libérés mardi 29 octobre ont pu écouter RFI pendant leur détention. C'était le cas de Pierre Legrand, le plus jeune. Il l'a raconté à son grand-père René Robert,  mercredi soir, au téléphone. Il lui a aussi raconté que les ravisseurs écoutaient la radio. 

« Lorsque je l’ai eu au téléphone, raconte René Robert, il m’a confirmé le grand bonheur qu’il a eu de m’entendre, et effectivement m’exprimer sur votre antenne.
Je ne sais pas à quelle période cela s’est passé. Il était dans l’Adrar des Ifoghas à ce moment-là – c’est ce qu’il m’a dit – et il m’a confirmé effectivement, que les moudjahidines écoutaient RFI et lui avaient transmis les propos que j’avais tenu et qu’ils avaient même fait un commentaire en disant que ce que j’avais exprimé était quelque chose de bien.

Donc je suis incapable de vous dire ce que j’ai dit ce jour-là, parce que je ne saisis pas la période à laquelle cela s’est passé. Mais en tout cas je me félicite du concours que vous nous avez apporté – RFI – pour que les messages leur soient transmis, parce que Pierre nous l’a dit, c’est un grand réconfort.

Il a dû m'entendre au moins une fois et les propos ont été rapportés une autre fois. Je n’en sais pas plus et je n’ai pas posé beaucoup de questions. En tout cas on n’imaginait pas qu’ils puissent entendre. Il s’avère qu’ils nous ont entendus. Donc c’est précieux et c’est très fort ».

Ex-otages d’Arlit: les dessous d’une libération

Retour sur les dessous de la libération des quatre otages français d'Arlit rentrés en France, le mercredi 30 octobre 2013, après plus de trois ans de détention dans le Sahel. Alors qu’ils viennent de passer leur première soirée en familles, les informations sur les contreparties qui ont permis aux négociations d’aboutir se multiplient. Des négociations longues et difficiles impliquant le Niger, la France, mais aussi le Mali, où les Français se trouvaient encore il y a 48 heures.
La France a-t-elle versé une rançon en échange de la libération des otages ? Non, assurent les autorités françaises : «La France ne verse pas de rançon», a tenu à réaffirmer l'Elysée mercredi. Officiellement, le président François Hollande s’en est fait une doctrine depuis son arrivée à l’Elysée. Et mercredi soir encore le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, interrogé sur une possible rançon payée par de l'argent «privé», a répondu : «Pas d'argent public versé». Une phrase qui laisse planer le doute.
D’autant que selon une source proche des négociateurs nigériens citée par l’AFP, de l'argent aurait bel et bien été versé en échange de la libération des otages, «entre 20 et 25 millions d'euros». Cet argent aurait été prélevé sur les fonds secrets alloués aux services de renseignement, affirme le journal Le Monde. C'est même, précise le quotidien, le président du Niger qui aurait téléphoné en personne à François Hollande pour lui dire en substance : «On peut les sortir, mais il va falloir payer».


Une version que Soumeylou Boubeye Maïga, le ministre malien de la Défense refuse de confirmer, préférant parler de «compensations» plutôt que de rançon : «Nous préférons nous en tenir à ce que le gouvernement français a dit. Qu’il y ait eu des compensations sous une forme ou sous une autre, je crois, ne change rien au fond du problème», assure le ministre. Le fond du problème étant «que la lutte contre les groupes terroristes doit se poursuivre, que ces groupes ne sont pas morts depuis Serval et qu’il faut continuer la lutte contre eux sous une nouvelle forme». Et d’avancer une autre explication : «La présence de la force militaire a pu à un moment donné, peser aussi dans l’attitude finale des ravisseurs qui savaient que tôt ou tard ils devraient en arriver là. C’est-à-dire, libérer les otages».

Renégocier des contrats

On sait par ailleurs que le Niger a joué un rôle-clé dans la libération des Français. Et certains observateurs pensent que le président Mahamadou Issoufou a obtenu des contreparties, notamment une renégociation de ses contrats d’exploitation avec le groupe français Areva, qui employait les otages. Niamey dénonce en effet depuis longtemps un partenariat «déséquilibré» et réclame des retombées plus importantes pour le pays.
Le 7 octobre dernier, le PDG d’Areva, Luc Oursel a d’ailleurs été reçu à Niamey par le président du Niger. De quoi ont-ils parlé ? La perspective d’une libération a-t-elle permis au président Mahamadou Issoufou d'obtenir des garanties à ce sujet ? Pour Rhissa Feltu, le maire d'Agadez dans le nord du Niger, c'est en tout cas le moment où jamais de prendre le dessus : «C’est l’occasion pour le Niger de se repositionner et de revoir à la hausse ses contrats d’uranium avec Areva. Le Niger fait énormément d’efforts en matière de sécurité aujourd’hui. Cela doit permettre au Niger de se repositionner aussi bien dans la renégociation de ses contrats avec Areva que dans le repositionnement géopolitique dans la région».


D’autres contreparties possibles

Ce n’est pas le seul levier dont disposait Paris, et d’autres compensations sont évoquées. Parmi elles, la récente levée des mandats d'arrêts internationaux contre des personnalités touarègues. Cette levée de sanction avait d’abord été perçue comme un geste d’apaisement de la part des nouvelles autorités maliennes. Mais aujourd’hui, certains se demandent s’il ne s’agissait pas de répondre à des exigences de combattants Touaregs impliqués dans le processus de libération des otages français.

«Depuis quelque temps on savait, en tout cas du côté de la médiation nigérienne, que les choses ont beaucoup évolué et qu’il restait un dernier obstacle, notamment la question des mandats d’arrêt qui pèsent contre un certain nombre de responsables de la rébellion touarègue du côté malien», explique Seidik Abba, rédacteur en chef à Jeune Afrique. «Donc il y a eu des tractations qui ont été difficiles, qui ont impliqué à la fois le Niger, la France et même le Mali puisque c’est le Mali d’après ce que l’on sait aujourd’hui qui a permis de faire sauter les derniers verrous, les mandats d’arrêts qui ont été levés à Bamako. Et cela a été décisif», assure-t-il.

Décisive aussi une garantie d’impunité qui, selon nos informations, aurait été accordée à Iyad Ag Ghali, aujourd'hui chef du mouvement islamiste armé Ansar Dine. Cet ancien rebelle touareg serait lié aux otages d’Arlit par l’intermédiaire d’un de ses proches, Abdelkrim le Targui. Car en septembre 2010 lors de l’enlèvement des sept otages, Abou Zeid n’est pas seul, assure une source sécuritaire malienne. Il y a aussi Abdelkrim, le seul touareg à la tête d’une katiba d’Aqmi. Or Iyag Ag Ghali est doublement recherché par le Mali et les Etats-Unis. Et certaines sources assurent qu'il aurait pu se servir des otages comme d'une monnaie d’échange pour négocier son impunité et celle de ses hommes.

Libération des otages: questions sur le versement d'une rançon
Les otages sont arrivés sur le sol français. Ils sont libres. Les quatre otages français enlevés en septembre 2010 retrouvent leurs proches et, passée l'émotion de leur libération, les questions sur les conditions de leur libération et notamment le versement d'une rançon se précisent.
Les conditions de la libération de ces otages et les éventuelles contreparties versées aux ravisseurs suscitent de nombreuses questions depuis l'annonce de la libération des ex-otages d'Arlit, comme à chaque libération d'otages.


Comme l'explique notre correspondant à Bamako, les libérations d'otages sont assorties de plusieurs revendications. Dans le cas des otages d'Arlit, par exemple, les ravisseurs auraient pu exiger le retrait de l'interdiction du voile islamique dans les lieux publics ou dans les écoles ; ils n'ont pas demandé cela. Autre revendication, la libération des prisonniers djihadistes dans les pays du Sahel ou en France. Or il n’y a pas eu, en tout cas officiellement, de libération de djihadistes au Mali ou au Niger, ou même en France récemment, avant la libération des derniers otages d'Arlit. Dernière revendication, elle est d'ordre financier : c’est ce qu’on appelle la rançon. Mais dès que l'on parle de rançon, personne ne veut s'exprimer.

Précisions sur le versement de la rançon

Dans le cas des Quatre d'Arlit, il y a eu une compensation financière, selon une source très proche de la médiation, citée par le quotidien Le Monde. Une information confirmée par notre correspondant à Bamako, Serge Daniel : «Nous avons effectivement, remis de l’argent, au moins 20 millions d’euros aux ravisseurs». Voilà ce que lui déclarait une source très, très proche de la médiation.
Une voix qui concorde avec le témoignage de Diane Lazarevic, fille de Serge Lazarevic, enlevé par Aqmi au nord-est du Mali en compagnie de Philippe Verdon le 24 novembre 2011. Interrogée par Europe 1 ce mercredi matin, elle est persuadée qu'une rançon a bien été versée : «... le Quai d’Orsay m’à bien dit il y a deux mois que la France ne paierait pas, mais que sûrement Areva le ferait. Ce sont les mots du Quai d’Orsay». «Areva est une grosse entreprise, explique Diane Lazarevic, il y a beaucoup d’argent, beaucoup d’enjeux… Mon père lui derrière, il n’a pas d’entreprise, il n’a rien».

100 millions d'euros exigés à l'origine

L’historique de cette rançon serait la suivante : dans un premier temps, pour libérer les quatre otages, Al-Qaïda au Maghreb islamique avait demandé 100 millions d’euros. Entre temps, il y a eu l’intervention française dans le nord du Mali pour empêcher les djihadistes de descendre vers le Sud. Les négociations ont repris d’abord par un canal malien. Ça n’a pas fonctionné. C’est finalement le Niger qui est entré dans la boucle dans une négociation transversale puisque les otages ont été libérés sur le territoire malien. Le Mali ayant été tenu informé de ce qui se passait.
Le médiateur nigérien s’est rendu plusieurs fois sur le terrain. Quand le principe de la libération a été acquis, il a fallu s’entendre sur les modalités.

20 millions d'euros contre les coordonnées GPS des otages

Le quotidien Le Monde assure lui que plus 20 millions d'euros ont bien été versés aux ravisseurs. La remise de rançon s'est déroulée dans l'extrême nord-ouest du Mali, près des frontières algérienne et mauritanienne, dans une zone désertique. Les hommes de la DGSE ont alors échangé la somme d'argent contre les coordonnées GPS de l'endroit où étaient cachés les quatre otages d'Arlit. Ces 20 millions d'euros proviendraient des fonds secrets de la République. Une remise de rançon qui irait donc à l'encontre de la promesse du président Hollande qui avait assuré que la France ne paierait plus.

La porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem questionnée sur le sujet, a déclaré dans la matinée que la France n'avait «pas changé de politique à l'égard des rançons» rappelant les propos du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. «La France n’a pas participé directement aux tractations sur la libération des otages. C’est le Niger qui a réussi à trouver une issue à cette trop longue prise d’otages. Sur la question des rançons, notre politique est constante en la matière» a déclaré la porte-parole du gouvernement. Le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius a lui aussi été sollicité sur cette question. « La France ne paie pas des rançon, je suis clair et net. C’est la consigne qu’a donnée le président de la République, elle est respectée. Pour ce qui dépend de l’Etat français, pas d’argent public versé» a tranché le chef de la diplomatie française.


La rançon jugée crédible par un ancien agent de la DGSE

Cet ancien analyste des services extérieurs ne se dit nullement surpris. Pour lui, pas de doute, une rançon a bien été versée. La doctrine française en la matière avait soit disant changé, force est de constater qu’elle est toujours la même : la France continue de payer pour libérer ces otages.

Vingt millions d’euros dans ce cas précis, « ça paraît beaucoup d’argent, explique cet ancien analyste de la DGSE, mais c’est crédible car, dans ce genre d’affaires, il faut récompenser beaucoup de gens ». Les intermédiaires sont nombreux et ce dernier de citer une récente affaire où le président d’un pays aurait touché une partie de la rançon.
Alors dans cette affaire, qui a payé : l’Etat français, Areva, Vinci ? Selon Le Monde, l’argent aurait été fourni par la France via des fonds secrets. Aux yeux de notre agent, Areva avait intérêt à tout faire pour libérer ces otages pour s’éviter un éventuel procès intenté par les familles. Cette rançon et son montant pourrait maintenant apparaître comme un problème pour l’exécutif. Les familles des autres otages pourraient se mettre à protester : pourquoi, ne pas payer aussi pour eux ? Ensuite, « des pays vont être secoués par ces révélations », prédit notre agent qui s’attend notamment à la réaction courroucée de l’Algérie, toujours opposée au paiement de rançons.

Cet ancien analyste des services extérieurs se dit étonné par un point : « Pourquoi ces révélations sortent-elles dans la presse si rapidement ? Est-ce là un coup politique ? », S’interroge-t-il. En attendant, la polémique est loin d’être close.

Libération des otages: des négociations très secrètes


Dès la semaine dernière, notre correspondant dans la région suspectait une accélération des négociations autour de la libération des otages français d'Arlit. Le départ du négociateur nigérien pour un long voyage dans le désert avait attiré son attention. Le parcours qu'il a emprunté s'est avéré être le même que celui des ravisseurs. Edition spéciale sur RFI, mercredi 30 octobre, de 5h TU à 8h TU (6h à 9h, heure de Paris).
Dès la semaine dernière, on a su qu’il y avait des négociations très avancées pour la libération de ces otages. Un des deux négociateurs, le médiateur nigérien, fait sa valise, puis prend un 4x4, et prend beaucoup de vivres.

On a soupçonné qu’il était parti pour un long voyage. Et quand on fait un long voyage dans le désert, c’est toujours pour quelque chose. Or, on savait qu’il faisait partie des médiateurs, et il était accompagné d’un Européen qui a démenti, mais était également sur le terrain.

Démenti de François Hollande

On a pris tout de suite contact avec eux et son assistant nous a dit : « C’est vrai, votre information est bonne, mais il faut beaucoup de discrétion autour de cette affaire-là ». On a donc donné l’information en disant que les négociations s’accéléraient pour libérer éventuellement les otages.

Une partie des opérations en cours aujourd’hui, (...) avaient pour but de sécuriser les négociations.

Il y a eu immédiatement ce démenti des autorités françaises, du président François Hollande lui-même, mais nous savions que les négociations se poursuivaient.
À un moment, ce médiateur, pris de panique, parce que les Français ou des alliés lui ont dit que la presse – et notamment RFI – était au courant de l’affaire, nous a fait appeler pour nous dire : « calmez-vous ».

Mais en fait, c’était une stratégie pour poursuivre ces négociations. Ce qui a probablement retardé les choses, c’est que les dernières négociations se sont déroulées sur le territoire malien. Ensuite, les otages n’étaient pas au même endroit, et il a fallu les rassembler avant de pouvoir obtenir leur libération.

Filière touarègue

Le négociateur nigérien [probablement Mohamed Akotey, NDLR] est parti de Niamey et est venu vers la frontière malienne. C'est-à-dire qu’il a pris le parcours que les ravisseurs font lorsqu’ils enlèvent des otages au Niger. Pour monter vers le désert malien, mais pas dans le Sahel. Et ce qui se dit aujourd’hui, c’est qu’une partie des opérations militaires qui sont en cours aujourd’hui [opération Hydre, NDLR], avaient pour but de sécuriser les négociations en cours et le transfert de cette délégation dans le nord du Mali.
Le fait que le négociateur était membre de la communauté touarègue du Niger montre que les ravisseurs étaient sans nul doute des Touaregs. La filière est une filière touarègue.

Libération des otages d'Arlit au Niger: pourquoi le silence ?
Par RFI

A l'arrivée des ex-otages Thierry Dol, Daniel Larribe, Pierre Legrand et Marc Féret, sur le tarmac de Villacoublay, mercredi 30 octobre, le président Hollande a proposé aux otages de prendre la parole. Surpris, presque interloqués de la proposition, ils n'ont pas souhaité s'exprimer. « Ils seront libres de s'exprimer quand ils le voudront, c'est ça la liberté » a commenté le président français.
Pourquoi ce silence qui tranche avec l'attitude des autres otages libérés ces dernières années ?

Leur longue durée de détention, trois ans, est une des explications, une parmi tant d'autres.
Aucune allocution n'était prévue. Mais finalement, François Hollande est revenu sur le tarmac de l'aéroport entouré des quatre ex-otages. Le président français a pris la parole pendant plusieurs minutes. Pas un mot, en revanche de ceux qui viennent juste de recouvrer la liberté.

Y a-t-il eu instruction des autorités françaises ? Absolument pas selon les deux filles de Daniel Larribe, le plus âgé des ex-otages : «On ne leur a rien dit du tout, on leur a laissé le choix... Je pense qu'ils sont tous dans la même posture avec un peu de mal à se reconnecter. Ce ne sont pas des gens qui sont habitués à communiquer avec la presse. Pour nous c'est déjà très difficile, alors pour eux ça l'est encore plus j'imagine».

Pour Marion et Maud Larribe, qui venaient juste de passer une petite heure avec leur père, le contraste entre la captivité et cette soudaine exposition était trop fort. «C'est très compliqué de passer d'une réclusion de trois ans, dans un environnement extrêmement austère et coupé du monde et tout d'un coup, quand ils sont arrivés à Niamey, ils ont été submergés par les forces de l'ordre, les ministres français, les diplomates...».

Garder le chèche

Les proches d'un autre otage, Pierre Legrand, confirment et ne se disent pas surpris : «On connaît Pierre, il n'est pas du genre à se mettre en avant» confiait, mercredi 30 octobre, Camille Bondu, une de ses proches avant d'ajouter comme une évidence, «que dire après trois ans d'isolement en plein désert ? Surtout à des inconnus».

Même à son entourage il n'a pas donné beaucoup de détails sur sa détention. «Ce qui l'intéressait, confie son grand-père René Robert, c'était prendre des nouvelles de ses amis, retrouver ses sœurs et parler des petites choses du quotidien».

«Si les quatre Français n'ont pas fait de déclaration en arrivant en France, c'est tout simplement qu'ils n'étaient peut-être pas dans la disposition mentale pour », estime Claude Larribe, le frère de Daniel. « Ils sont peut-être encore un peu là-bas dans leur tête » ajoute-t il, avant de relever que Daniel n'avait pas encore taillé sa longue barbe mercredi, et que deux des otages avaient toujours leur chèche autour du coup, symbole pourtant de leur détention. «Ils ont eu besoin d'un temps tampon je crois. Finalement, garder le chèche c'était aussi une manière de garder une distance» suggère l'une des filles de Daniel Larribe.

Areva et le Niger, une histoire commune

Les désormais quatre ex-otages d'Arlit sont en France, où ils se sont posés peu avant midi aujourd'hui.
Une fois la joie des retrouvailles passée, un certain nombre de questions restent en suspens sur les conditions de leur libération. Malgré les informations de nos confrères du journal Le Monde affirmant que 20 millions d'euros, puisés dans les fonds spéciaux du gouvernement, ont été versés à titre de rançon, les autorités françaises démentent formellement avoir payé les ravisseurs.
Mais la question du rôle des entreprises est posée.
Les otages sont d'abord des employés d'Areva et Vinci, des firmes dont la surface financière est importante. C'est à ce titre et sur leur lieu de travail, sur le site d'Arlit, qu'ils ont été enlevés le le 16 septembre 2010. Le 24 février 2011, Françoise Larribe, la femme de Daniel Larribe, ainsi qu'un employé togolais et un malgache étaient libérés.

Moyennant finances, apparemment, puisque selon la journaliste de l'Agence France presse Dorothée Moisan, auteur du livre Rançon, une enquête sur le business des otages, une rançon de 13 millions d'euros aurait été versée par Areva et Vinci pour obtenir ces libérations. Son livre n'a pas déclenché de démenti excessif.

La question qui se pose aujourd'hui c'est donc bien de savoir si une nouvelle rançon a été versée pour la libération des quatre otages d'Arlit. Les entreprises concernées gardent le silence là-dessus.

Des relations anciennes et assez intimes

Le Niger, pour Areva, est un pays absolument stratégique et essentiel. En effet, le n°1 mondial du nucléaire extrait du sous-sol nigérien plus de 30% de l'uranium produit par l'entreprise. En attendant le début de l'exploitation de la mine d'Imuraren, prévu en principe pour 2015, c'est à 80 km plus au nord, à Arlit, qu'Areva est présente. La mine appartient pour 64% à Areva et pour le reste à l'Etat nigérien.
Plusieurs entreprises sont présentes sur place. Areva directement bien sûr, mais aussi Vinci par l'intermédiaire de sa filiale Satom, pour toute la partie logistique et travaux publics. Areva est tout simplement le premier employeur privé du Niger.

Pour autant, le Niger considère ne pas assez profiter des retombées de la mine. Le président Issoufou comme le ministre des Mines l'ont dit à de multiples reprises. Le Niger a beau être le deuxième producteur d'uranium au monde, cela ne contribuait qu'à hauteur de 5% au budget de l'Etat pour l'année 2012, soit environ 100 millions de dollars de retombées fiscales par an. Un partenariat déséquilibré juge la partie nigérienne qui  estime qu'en 40 ans et 120 000 tonnes d'uranium exportées, le Niger a vu lui échapper  un milliard d'euros.

Des accords en pleine renégociation

Une négociation qui était évidemment hypothéquée par le cas des otages et plus généralement par la question de la sécurité des sites d'exploitation. Après l'enlèvement, la sécurité du site d'Arlit avait été renforcée et pourtant, le 23 mai dernier, un attentat suicide faisait 3 morts sur place et la production s'était arrêtée pendant 3 mois.

Avec cette libération, l'hypothèque est levée et plutôt en faveur des autorités nigériennes qui peuvent mettre en avant leur travail et leur efficacité tout au long de l'affaire. De là à dire qu'Areva a une dette envers le Niger et le président Issoufou, il y a un pas qu'on se gardera bien de franchir, mais c'est tout de même un élément à prendre en compte dans cette négociation.
Car elle continue, il y a quelques jours Luc Oursel, président d'Areva, s'était rendu avec Laurent Fabius à Niamey. A posteriori, on peut imaginer que c'était pour parler principalement des otages, mais peut-être pas uniquement. Quelques heures plus tard, Areva signait un accord pour exploiter un gisement en Mongolie, avant que l'on apprenne que le Groenland autorisait l'exploitation de l'uranium sur son sol. Ainsi, en quelques jours, les conditions de cette négociation entre le Niger et Areva ont radicalement changé. 

Ex-otages français d'Arlit: questions sur l'implication d’Iyad Ag Ghaly
Par RFI

Les questions restent nombreuses après la libération des quatre otages d’Arlit mardi 29 octobre et parmi celles-ci le paiement d’une rançon. Malgré le démenti de l’Elysée, plusieurs sources évoquent le versement d’une somme de 20 millions d’euros. L’autre question est le rôle de lyad Ag Ghaly. Le chef d’Ansar Dine, ex-rebelle touareg des années 1990, aujourd'hui islamiste et leader charismatique dans sa région d’Abeibara au nord de Kidal.

Est-il lié à la détention et la libération des quatre Français?

C’est par le biais d’Abdelkrim le Targui que Iyad est lié aux otages d’Arlit. En septembre 2010, lors de l’enlèvement des sept Français, Abou Zeid n’est pas seul, assure une source sécuritaire malienne. Il y a aussi Abdelkrim, le seul touareg à la tête d’une katiba d’Aqmi. Abdelkrim est un cousin de Iyad , les deux hommes sont intimement liés. Dans les années 1990, Abdelkrim est l’imam de la mosquée de la Dawa fondée par Iyad à Kidal. A la création d’Ansar Dine, Abdelkrim mettra ses combattants au service de son parent.

A la mort d’Abou Zeid, en mars dernier, les deux hommes héritent des otages français. Des otages qui n’étaient pas cachés loin, assurent plusieurs bons connaisseurs du secteur. Juste de l’autre côté de la frontière en territoire algérien, au nord de Bourassa là où les Français ne risquent pas de s’aventurer sans le feu vert d’Alger. Des otages qui, au fil des mois, vont devenir une planche de salut pour Iyad, une monnaie d’échange contre des garanties d’impunité pour lui et ses hommes.

Une fois de plus, Iyad a gagné sur tous les tableaux, estime un officiel malien qui constate quelque peu dépité le récent retour à Kidal des combattants d’Ansar Dine. Un retour en toute impunité qui interroge sur les objectifs de Serval affirme cet officiel qui rappelle que la mission des forces étrangères au nord du Mali est la lutte contre les groupes terroristes.

L'Algérien Mokhtar Belmokhtar aurait «supervisé» les attaques d'Agadez et Arlit au Niger
Par RFI
Après les premières revendications du Mujao, le groupe djihadiste de Mokhtar Belmokhtar a annoncé avoir participé au double attentat de ce jeudi 23 mai au Niger. Son porte-parole a expliqué à l'agence de presse mauritanienne al-Akhbar, que l'Algérien avait « supervisé » les attaques. Ce vendredi, le groupe armé a menacé le Niger de nouvelles attaques.
Dans un premier communiqué, le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) revendique le double attentat meurtrier avant d'expliquer que ces opérations avaient deux objectifs. Le premier était de viser les intérêts de la France au Niger à cause de sa présence militaire au Mali.

Le porte-parole du Mujao, Walid Abou Sahraoui explique que l'armée nigérienne était également attaquée pour le soutien de Niamey à Paris dans les opérations militaires au nord du Mali.

Dans la nuit du jeudi 23 au vendredi 24, le Mujao publie un second communiqué, assez court. Il y précise que la katiba, le groupe armé « Les Signataires par le sang », a également participé aux attentats. Ce groupe est dirigé par l'Algérien Mokhtar Belmokhtar.
Cette grande figure du djihadiste dans le Sahara avait quitté les rangs d'al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), il y a quelques mois, pour créer son propre groupe. Plus récemment, le Tchad avait affirmé qu'il avait été tué lors des combats survenus dans les massifs de l'Adrar des Ifoghas. Une mort que plusieurs sources sécuritaires régionales avaient refusé de confirmer.

Nouvelles menaces

Vendredi 24 mai, le groupe de Mokhtar Belmokhtar menace de nouvelles attaques sur le territoire nigérien. Il annonce dans un communiqué envoyé à l'Agence France-Presse prévoir de prendre pour cibles la France et tous les pays qui participent aux opérations militaires au Mali.
Dans ce document, « Les Signataires par le sang » estiment que « la France tente actuellement de fuir (le Mali) et d'y engager des mercenaires à sa place ».
Menaçant les pays qui envisageraient de participer à cette « croisade », le communiqué annonce que des « colonnes de djihadistes et de candidats au martyre se tiennent prêtes et n'attendent qu'un ordre pour foncer sur leurs cibles ».


Exploitation minière au Niger : Le ras-le-bol de la région d’Agadez


Le Groupement des organisations de la société civile de la région d’Agadez dénommé GOSCRAZ, rejoint par les députés nationaux élus au titre de la région, le conseil régional d’Agadez et par un groupe de chefs traditionnels de la même localité, ont exprimé à travers une déclaration rendue publique, hier jeudi 10 janvier 2012 à Niamey, au siège du groupe alternative espace citoyen, des vives inquiétudes et autres préoccupations par rapport à la situation relative à la recherche et à l’exploitation minière dans la région d’Agadez.

Après un demi-siècle de recherche et d’exploitation d’uranium dans la région d’Agadez, c’est aujourd’hui un chiffre d’affaires de plus de 350 milliards par an qui est réalisé par le groupe Areva et la Société des Mines d’Azelik (SOMINA) au Niger, indiquent les signataires de cette déclaration, avant d’énumérer les conséquences de l’exploitation de l’uranium sur les populations et l’environnement.



Des conséquences fâcheuses 



Ces conséquences se résument en : l’épuisement des nappes fossiles, le stockage de 45 millions de tonnes de résidus radioactifs (cas des mines des filiales d’Areva au Niger), la disparition de la faune, de la flore, (bois de chauffe, aires de pâturage...), la pollution, dégradation et modification irréversible de l’environnement physique, la dégradation des mœurs locales, l’état de dégradation avancée du réseau routier d’Agadez en général et de la route Tahoua-Arlit dite Route de l’Uranium en particulier qui est l’expression type de l’échec de la recherche et de l’exploitation de l’uranium au Niger, le transport dans des mauvaises conditions et stockage dans les habitations des produits chimiques ( carbonate, soufre, nitrate, acide sulfurique, soude...etc), la dispersion par les filiales d’Areva au Niger des ferrailles radiologiquement contaminées dans les villes, la création de zones d’exclusion de 450 Km2 ( cas de la ceinture dite sanitaire d’Imourararen SA), la très faible utilisation de main d’œuvre locale, la Très faible promotion des entreprises locales, la très faible participation au développement local, le développement des maladies liées à la radioactivité, l’utilisation abusive et illégale de la sous-traitance, la non implication des ONGs et associations dans les opérations de suivi et évaluation des impacts environnementaux et sociaux tel que stipulé par les textes nationaux portant sur la procédure administrative d’évaluation et d’examen des impacts environnementaux, la démission totale des cadres de l’administration étatique (mines et environnement, d’Evaluation Environnementale des Etudes d’Impact) dans le suivi des activités de recherche et d’exploitation minière, l’épuisement de la nappe d’eau sur les sites uranifères, la contamination de la nappe phréatique par le nitrate utilisé lors des tirs dans la mine de Tchirozérine, la faible extension du réseau électrique au profit de la population, le risque de développement des maladies liées aux poussières de charbon.



Les péchés de la société chinoise Somina

Dans le cas particulier de la Société des Mines d’Azelik (SOMINA), les signataires de cette déclaration relèvent : le non-respect par celle-ci des normes environnementales en matière de gestion des résidus solides et liquides radioactifs comme les eaux usées déversées dans la vallée et consommées par les animaux ; la non information et sensibilisation des travailleurs et de la population sur la radioactivité ; le non-respect des règles de sécurité au travail (tenue de travail, protection …etc) ; la non déclaration des travailleurs à la caisse nationale de sécurité sociale par les sous-traitants ; un recrutement déshumanisant de la main d’œuvre ; la non-participation au développement local ; le non-respect des valeurs culturelles des populations ; les mauvaises conditions de logement pour les forces de défense et de sécurité.

Cas d’autres sociétés de recherche minière

Plus de 200 permis de recherche ont été octroyés dans le domaine minier à des sociétés, comme GOVIEX, GLOBAL Uranium, GAZPROM, Niger Ressources, Niger Uranium, PALADIN. Mais à cette date aucune de ces sociétés bénéficiaires desdits permis n’a participé au développement local de la région, dénonce le groupement des organisations de la société civile de la région d’Agadez. En outre, cette structure dit constater une violation par ces sociétés, des dispositions de la convention type qui leur fait obligation de participer au financement des infrastructures collectives territoriales. Selon le GOSCRAZ, ces sociétés ont entrepris ces derniers temps un rapatriement des capitaux à travers la mise à l’écart des sociétés et entreprises locales au profit des celles venues de l’extérieur avec leur main-d’œuvre entraînant ce faisant la mise en chômage des jeunes dans une zone où l’Etat s’évertue à consolider la paix en créant des emplois.
Au vu de tout ce qui précède, les organisations de la société civile de la région d’Agadez lancent un cri d’alarme à l’endroit des plus hautes autorités et à l’ensemble des citoyens Nigériens de prendre conscience de la gravité de cette situation qui risque de mettre en péril la stabilité, la quiétude, et la sécurité de notre pays, ont-ils averti.

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 Niger: des milliers de manifestants anti-Areva dans le nord



Des milliers de personnes ont manifesté samedi dans la cité minière d'Arlit dans le nord du Niger contre le groupe nucléaire français Areva qui exploite depuis plus de 40 ans l'uranium dans cette zone désertique, a-t-on appris auprès des organisateurs.

"L'objet de la manifestation qui a regroupé quelque 5.000 personnes est de soutenir le gouvernement dans ses prochaines discussions avec Areva au sujet de notre uranium", a indiqué à l'AFP Azaoua Mamane, l'un des organisateurs.

Le chiffre de 5.000 participants a été confirmé par plusieurs autres sources.

La manifestation a été organisée à appel d'une coalition de la société civile locale, selon la radio privée Anfani.  Les manifestants - élus locaux et membres de la société civile, auxquels se sont joints des habitants -, ont défilé dans les rues de la ville avant de tenir un meeting à la "Place de la concertation", ont indiqué des habitants joints au téléphone par l'AFP.

Les protestataires ont scandé des "slogans anti-Areva", qu'ils accusent de "polluer" leur environnement déjà très hostile, de "provoquer la radioactivité" et "de ne s'être guère soucié des préoccupations quotidiennes des habitants", a précisé un élu local qui a participé à cette marche.


"La population a hérité de 50 millions de tonnes de résidus radioactifs stockés à Arlit et Areva continue de pomper gratuitement 20 millions de mètres cubes d'eau par an pendant que la population meurent de soif", a dénoncé M. Mamane.

Selon lui, "les rues et les habitations d'Arlit sont construits à l'aide de résidus radioactif et la nappe phréatique usée et contaminée s'assèche par la faute d'Areva".

"Le pire c'est que Areva continue de nier tout cela", a-t-il déploré.

Le Premier ministre du Niger, Brigi Rafini, a affirmé le 6 octobre que le Niger va "passer au peigne fin" ses contrats miniers avec Areva en jugeant son partenariat "déséquilibré".



Le Niger, qui compte parmi les grands producteurs mondiaux d'uranium mais reste l'un des pays les plus pauvres du monde, avait critiqué fin octobre 2012 le partenariat historique "très déséquilibré" avec Areva et réclamé des retombées plus importantes.



URANIUM DU NIGER

Le juste combat de Mahamadou Issoufou Président du NIGER



Le torchon brûle entre Niamey et AREVA du nom de ce groupe nucléaire français qui, depuis 40 ans, exploite l’uranium du pays de Diori Hamani. En effet, le 12 octobre dernier, quelque 5 000 personnes, à l’appel d’une coalition de la société civile, ont battu le macadam à Arlit, pour, dit-on, « soutenir le gouvernement dans ses prochaines négociations avec AREVA ».

Des sources concordantes indiquent que des élus locaux et membres de la société civile nigérienne se sont joints aux populations pour dénoncer l’attitude du groupe nucléaire français qu’ils accusent de « pomper gratuitement 20 millions de mètres cubes d’eau par an alors que les habitants meurent de soif ». C’est tout dire.



L’uranium nigérien profite plus aux Français qu’aux populations nigériennes



Et cette manifestation témoigne d’une prise de conscience des populations et des gouvernants nigériens face à l’attitude des Occidentaux qui ne voient que leurs propres intérêts. La preuve, cela fait plus de 40 ans qu’AREVA exploite l’uranium nigérien, mais le pays de Mahamadou Issoufou a toujours été dans les profondeurs du classement du PNUD en matière de développement humain durable. C’est dire que l’uranium nigérien profite plus aux Français qu’aux populations nigériennes qui, malheureusement, subissent les affres de l’exploitation minière que sont l’assèchement des terres et la pollution de l’environnement. Il y a donc lieu de revoir ces contrats déséquilibrés pour que les populations africaines puissent profiter des ressources de leur pays. En vérité, en dehors de l’Algérie qui exploite judicieusement son pétrole, on a l’impression que les ressources minières sont une source de malédiction pour bien des pays d’Afrique noire et cela, parce que les Occidentaux le veulent ainsi. Il suffit qu’un dirigeant africain menace de revoir les contrats miniers ou de redéfinir les accords de partenariats pour qu’illico presto, des rebellions surgissent dans son pays, si parfois on ne va pas jusqu’à attenter à la vie du chef de l’Etat lui-même.

Le président Alpha Condé de la Guinée n’a-t-il pas vu son fauteuil menacé pour avoir voulu réviser ses contrats miniers avec la France ?

Ils préfèrent être dans les bonnes grâces des Occidentaux plutôt que de prendre fait et cause pour leur peuple



En tout cas, il faut bien que l’Afrique se réveille et qu’elle sache dire non.



Ses dirigeants en particulier, doivent faire le choix entre le confort douillet du fauteuil présidentiel et l’épanouissement de leur peuple qui, parfois, ne demandent que le pain quotidien. Ils doivent savoir faire preuve de caractère, fût-ce parfois au prix de leur vie. Car, si Sékou Touré de la Guinée était craint des Occidentaux, c’est parce qu’il avait su mettre les ressources de son pays à l’abri des prédateurs et s’ériger contre l’injustice.

Certes, même n’ayant pas la technologie nécessaire pour une exploitation judicieuse de leurs ressources minières, les dirigeants africains peuvent, pendant la signature des contrats, exiger plus des Occidentaux ou à tout le moins se montrer moins condescendants. Ce qui n’est malheureusement pas le cas. Ils préfèrent être dans les bonnes grâces des Occidentaux plutôt que de prendre fait et cause pour leur peuple. Le président angolais Edouardo Dos Santos, qui était l’un des communistes purs et durs du continent, est devenu aujourd’hui le chouchou de Washington pour avoir accepté de signer des contrats qui favorisent les Américains dans l’exploitation du pétrole de son pays.

Mahamadou Issoufou en fera-t-il autant avec les Français ? On ne dira pas qu’il est dos au mur puisque Niamey brandit la menace de se tourner vers Pékin. En tout cas, le dernier mot lui revient puisque que lui-même est un ingénieur des mines. Il est mieux placé pour arracher de bons contrats pour son pays.


"Un internat pour scolariser les enfants défavorisés"

Au Niger, le taux de scolarisation atteint à peine 25% dans les zones rurales. Pour permettre aux enfants d'aller à l'école, un internat a ouvert ses portes en 2006 à Zinder, petite ville située au sud du pays. Son histoire racontée par la plateforme collaborative Carenews. 
       
Il fait un soleil de plomb sur Zinder, petite ville située au sud du Niger, non loin de la frontière avec le Nigéria. Soudain des cris, des chants et des rires viennent troubler le silence pesant de la steppe désertique. 
Comme chaque jour, le miracle se produit: 85 enfants s'apprêtent à commencer leur journée à l'internat de Zinder, créé par la Fondation d'entreprise Les Nouveaux Constructeurs-Premier en partenariat avec l'association française Education et Santé sans Fontière (Esafro) et l'association nigérienne Matassa.
Chaque année, nous recrutons 12 nouveaux enfants 
C'est en 2006 qu'un ancien collaborateur Les Nouveaux Constructeurs, travaillant pour un organisme de développement allemand au Niger, propose à l'entreprise de soutenir une association locale œuvrant pour l'éducation, Matassa


Objectif ? 

Créer un internat à Zinder, petite ville située à 800km à l'est de Niamey, la capitale, en plein milieu du Sahel, une région très aride en proie à une grande instabilité en termes de sécurité. Le but de cet internat est de favoriser l'éducation d'enfants issus de villages de brousse et de les accompagner jusqu'à leur entrée dans la vie professionnelle. 

Égalité respectée entre filles et garçons
Le défi est de taille: avec 62% de la population vivant sous le seuil de pauvreté, le Niger est l'un des pays les plus pauvres au monde. Le taux de scolarisation dans les villages de ce pays essentiellement rural atteint à peine 25%, et seulement 9% des filles ont la possibilité de suivre un enseignement secondaire. 
Forte de ce constat, la Fondation d'entreprise et l'association Esafro décident de se lancer dans cette aventure, et dès 2006, accueille les 12 premiers enfants dans une maison de location.
En 2007, sous la houlette de l'architecte Lionel de Segonzac, partenaire de l'entreprise Les Nouveaux Constructeurs, la construction de l'internat commence avec la mise en place d'un bâtiment pouvant accueillir 85 enfants. Un deuxième bâtiment de taille similaire vient d'être achevé, doublant la capacité d'accueil de l'établissement. 
Un deuxième bâtiment vient d'être achevé 
L'internat accueille filles et garçons à parts égales. Les élèves, encadrés par un personnel nigérien composé d'un directeur, de professeurs, d'éducateurs, d'infirmières, de cuisiniers et gardiens passent l'année entière à l'internat, vacances comprises. Les enfants y sont pris en charge du point de vue scolaire mais aussi social

"Les effectifs s'étoffent chaque année", explique Anne-Isabelle Dauça, responsable de la Fondation d'entreprise Les Nouveaux Constructeurs-Premier. "Chaque année, nous recrutons 12 nouveaux enfants, qui viennent de villages de brousse autour de Zinder, le plus éloigné étant à 150km". 


"On conserve un lien fort avec les villages d'origine"
Comme dans de nombreux pays sahéliens où les traditions séculaires de travail aux champs rendent souvent la scolarisation des enfants difficile, l'adhésion au programme par les familles est l'un des défis majeurs pour l'internat de Zinder. 
"On conserve un lien fort avec les villages d'origine des enfants", confie Anne-Isabelle Dauça, avant d'ajouter: "Les enfants ne rentrent pas chez eux durant l'année scolaire, mais nous essayons de faire venir les parents durant les vacances de Noël. Nous avons également mis en place des activités génératrices de revenus pour les femmes, des actions de soutien scolaire pour les enfants qui ne sont pas sélectionnés pour venir à l'internat, ainsi qu'un service de santé, qui permet aux villageois de venir se faire soigner à Zinder dans de bonnes conditions". 

La scolarisation des filles reste toujours un problème 
Et, ce travail de sensibilisation, notamment chez les femmes, commence à porter ses fruits. "La scolarisation des filles reste toujours un problème, en particulier pour les adolescentes. Elles sont dans une tranche d'âge difficile. Voyant leurs sœurs se marier, elles pensent qu'il serait peut-être plus facile de gérer une maison que de poursuivre des études. Heureusement, les femmes des familles nous soutiennent, ce sont elles qui envoient leurs filles à l'école et c'est déjà une grande réussite", poursuit Anne-Isabelle Dauça. 
Mais, d'autres nuages viennent voiler le ciel de Zinder, à commencer par la sécurité. À l'heure où le Sahel s'embrase et où les menaces à l'encontre des étrangers deviennent de plus en plus pressantes, la Fondation poursuit son action. 
"Nous continuons malgré les dangers. Nous venons de terminer la dernière phase de construction de l'internat et avons pris toutes les mesures de sécurité nécessaires. Nous avons des relais avec les autorités du Niger et suivons de très près la situation", conclut Anne-Isabelle Dauça. 
L'objectif est élevé: 144 enfants devraient être scolarisés en 2017, comme autant de nouvelles perspectives pour ces enfants du Sahel. Et de quoi, peut-être, susciter d'autres belles initiatives dans ces régions où, parfois, un sourire d'enfant peut changer beaucoup de choses. 
L'auteur: Alexandre Brecher


L'audit sur les mines d'Areva au Niger sera prêt fin octobre
 
NIAMEY (Reuters) - L'audit entrepris au Niger sur les mines d'uranium exploitées par le groupe français Areva sera achevé avant la fin du mois, a déclaré samedi l'ambassadeur de France à Niamey.
Les deux coentreprises entre Areva et l'Etat nigérien, Somaïr et Cominak, produisent environ un tiers du combustible utilisé par le parc nucléaire français. Mais le Niger, ancienne colonie française qui figure parmi les pays les plus pauvres du monde, estime qu'il ne tire pas assez de recettes de ses gisements d'uranium.
Le contrat actuel de 10 ans liant Areva à l'Etat nigérien arrive à son terme à la fin de cette année et Niamey espère profiter des discussions sur son renouvellement pour augmenter ses recettes fiscales et obtenir du groupe français des engagements en terme d'investissement dans les infrastructures.
"Il y a un audit qui est en cours en ce moment et qui a été décidé d'un commun accord entre le Niger et Areva dans le cadre des discussions pour le renouvellement des conventions minières de SOMAIR et COMINAK puisque ces conventions se terminent à la fin de cette année", a déclaré l'ambassadeur Christophe Bouchard à la chaîne de télévision DOUNIA.
"Cela servira de base pour alimenter les discussions en cours entre Areva et le Niger pour la renégociation des conventions notamment pour voir quelles vont être les conditions financières des nouvelles conventions, la fiscalité applicable", a-t-il ajouté.
"On attend avec intérêt, dans le courant du mois d'octobre, les résultats de cet audit", a-t-il précisé.
Les promesses d'investissement pourraient inclure la construction d'une nouvelle route reliant Tahoua à la région minière d'Arlit, à plus de 1.000 kilomètres au nord de la capitale.
"Nous respectons Areva comme partenaire stratégique mais nous voulons un partenariat équilibré", avait déclaré le ministre nigérien des Mines Omar Hamidou Tchiana lors d'un entretien le mois dernier à Reuters.
"Nous allons, tout en respectant notre partenaire, faire en sorte que le Niger aussi tire parti de l'exploitation de l'uranium", avait-il ajouté, en soulignant que l'Etat nigérien ne cherchait pas augmenter sa participation dans Somaïr et Cominak.
Niamey détient 36,4% de Somaïr, qui produit environ 3.000 tonnes d'uranium par an, et 31% de Cominak, dont la production annuelle avoisine 1.500 tonnes. Présent au Niger depuis près d'un demi-siècle, Areva possède 63,6% de Somair et 34% de Cominak.
Le président nigérien, Mahamadou Issoufou, élu en 2011, affiche sa volonté d'augmenter fortement les recettes tirées de l'uranium, qui n'ont représenté l'an dernier qu'environ 5% du budget.
Abdoulaye Massalatchi; Pascal Liétout pour le service français



22/08/2013   Le Niger menacé par les criquets pèlerins
 

Les criquets menacent régulièrement le Niger.
Les criquets menacent régulièrement le Niger.

Par RFI
 
Les fortes précipitations tombées sur le massif de l’Aïr, au nord du Niger, ont favorisé la constitution de foyers de reproduction de criquets pèlerins dans la zone. Le Centre national de lutte antiacridienne (CNLA) de la région d'Agadez a envoyé des équipes pour tenter de circonscrire la menace.C’est dans la zone comprise entre le massif de l’Aïr et l’Arbre du Ténéré que se concentrent le regroupement et la reproduction des criquets pèlerins. L’eau déversée à travers les oueds a permis une reprise de végétation entre les dunes du Ténéré, végétation très prisée par les criquets.Tanko, chef du Centre national de lutte anti acridienne à Agadez explique : « Le criquet a amorcé ce qu’on appelle le processus de gré-garisation. Ce qui fait que les densités sont importantes. Donc, des groupes ont commencé à se former. Pour le moment, c’est circonscrit sur une petite zone ».

Vigilance

Plusieurs équipes en 4x4 ont été dépêchées sur la zone depuis une dizaine de jours. Elles ont pu traiter à ce jour près de 400 hectares. Dans ces zones de Timia et de Tabelot les producteurs maraîchers sont très vigilants par rapport à cette menace des criquets pèlerins. Un maraîcher à Afassas : « Dès qu’on a des nouvelles de ces criquets dans l’Aïr, on informe toute de suite les autorités. Sinon ces criquets viendront faire des dégâts. Ils mangent tout sur leur passage : les dattes, le blé, tout ce qu’on cultive, ces criquets peuvent le manger en une seule nuit ».
D’autres groupes de ces criquets pèlerins en mouvement sont signalés aux flancs des montagnes à l’est de Tabelot. Une équipe de prospection sera bientôt envoyée pour les localiser.



20/08/2013 Niger : inondations meurtrières à Agadez 
 
Des inondations dans la ville d'Agadez au Niger, en septembre 2009.
Septembre 2009 - inondations dans la ville d'Agadez

Par RFI
 
De fortes précipitations enregistrées à Agadez,  (plus de 100 mm en l’espace de quelques jours, phénomène inhabituel), ont provoqué des inondations dans la ville mais aussi dans la campagne, avec la crue des oueds. On compte deux morts et des dégâts importants. 


Reportage

Quand il a commencé à pleuvoir, Rakia, la cinquantaine révolue, ne pensait pas qu’il allait tomber autant d’eau. Pendant qu’elle évacuait l’eau, elle s’est retrouvée au milieu d’un flot qui la tenait jusqu’à la taille.

Elle a juste eu le temps de sortir de la maison. « Nous venons du quartier Katanga, explique-t-elle. Notre maison a été inondée, elle s’est effondrée. Nous y sommes retournés pour creuser et voir ce que nous pouvions retrouver sous les débris. Nous n’avons plus que ces pagnes que nous portons. »

Aicha a vécu la même épreuve. Elle raconte comment une quarantaine de familles au total ont été évacuées. « Ils ont envoyé deux camions pour nous transporter et nous amener ici dans cette école. Ils nous ont amené aussi des vivres pour manger, pour nous et nos enfants. »

Une fillette et un militaire victimes des inondations

Au niveau de la mairie d’Agadez, c’est Adamou Habi qui s’occupe de ces questions d’urgences. « Nous en sommes aujourd’hui à 67 maisons effondrées et 283 personnes touchées, dénombre-t-il. On a 45 familles sans abri. »

Ces inondations ont fait deux morts : une fillette de cinq ans écrasée par un mur et un militaire emporté par un oued en crue dans la zone de Dabaga. Oued qui a inondé aussi de nombreux hectares de cultures maraîchères et emporté de nombreux animaux en pâturage.

RETOUR à AGADEZ

La vieille ville d’Agadez avec ces visages bigarrés, avec ce dédale de ruelles, avec ces maisons ajourées d’un autre temps, avec ces portes ouvragées qui font penser à l’art arabe, où à chaque coin de rue, je rencontre des visages qui me sourient. Avec les adultes, on se dit bonjour, " Comment ça va ?... ʺ et les enfants qui se tiennent devant moi me saluent tout en faisant la génuflexion. Suprême respect

 Agadez a vu sa population s’agrandir très vite.


Phénomène dû aux différences climatiques (faible pluviométrie – sècheresses – pertes de pâturages dues à l’exploitation abusive des terres maraichères) et à la jeunesse qui délaisse la brousse pour trouver du travail moins éreintant. Le rêve de la consommation abusive (moto, téléphone, radio, vêtements, bijoux venant de Libye)  Tous ces nomades se réfugient dans la ville - grossissent les rangs de la pauvreté. Ainsi une grande partie de la ville d'Agadez est composée de quartiers de tentes en nattes autour d'un centre essentiellement construit en banco. Ou d’habitations construites en matériaux de récupération (plastic, cartons, bouts de tissus)





Agadez était une ville - étape des caravanes de sel. Une ville calme et on pouvait dénombrer 20 000 nomades il y a cinquante ans. Aujourd’hui Agadez est devenue la ville bruyante, trépidante, qui vit au rythme de cette machine détonante : la moto. C’est à celui qui pourra faire le plus de bruit, à grande vitesse, ignorant tout sur la route. Plus personne ne compte les accidents. Aucune législation, aucune assurance pour les motards.
Où se trouve cette ville qui vivait au rythme des heures du jour, ponctuait au loin par la prière de la grande mosquée ?




Dans mon quartier, ma maison est cernée aux quatre coins par 6 mosquées – habitation familiale désignée mosquée parce que le chef de famille se donne le titre d’imam - dont la toiture dispose de 2 grands hauts parleurs dirigés l’un vers l’ouest, l’autre vers l’est.
Le vacarme qui en résulte, rend les sons criards.peu attirants pour la prière.

Agadez est devenue une plaque tournante pour tous les commerces et où se côtoient plusieurs ethnies. Leur but à chacune est différente de l’autre – Agadez est la capitale pour les Touaregs, Agadez pour les uns est un refuge et pour les autres Agadez est un marché. Le dernier relai avant les grands espaces du désert  pour les camionneurs, les clandestins et les trafiquants en tous genres.
Quant au tourisme, le département d'Agadez a subi en 2007 le contrecoup d'une rébellion dont les effets se sont traduits par l'arrêt de toutes activités et de projets de plusieurs ONG.

Agadez est une ville où on peut trouver de tout. Elle a une grande activité faite de petits boulots. Son isolement lui a permis de garder son authenticité avec ses fêtes traditionnelles.Ses distractions dans la rue. Partage, convivialité, détente.



Agadez s’étend de plus en plus avec de nouvelles constructions appartenant à des Libyens, Toubous qui y trouvent là un eldorado pour leurs différents commerces. Il n’est pas rare de voir des habitations à étages du plus mauvais goût avec des façades truffées de climatiseurs de grand modèle, des colonnes de style romain, des portes en fer forgé qui ressemblent à des boucliers de gladiateurs.
Aucune législation n’a été prévue pour mettre un terme à ce paysage d’un autre temps.

Malgré ces points noirs peu reluisants d’une ville qui mérite d’être chantée, d’être glorifiée : AGADEZ est une ville où il fait bon vivre ; où les odeurs, les couleurs font chanter le cœur. La joie de vivre est omniprésente, néanmoins, elle tutoie la pauvreté dans un éclatement de rires, de chants. Et ça, c’est le mystère de l’Afrique. Les gens sont heureux de vivre. Émane d’eux une force de caractère, de puissance, de gaité qui font que je prends des leçons de philosophie qui ne demandent aucune réflexion.

Agadez est une ville extraordinaire, avec ses marchés d’où émanent des senteurs épicées qui m’enivrent durant de longues minutes.
Les hommes assis cernés par leurs produits : légumes, aromates, piments, cacahuètes, pain d’arachides sucré faisant le bonheur de tous les gourmands, interpellent untel, demandent des nouvelles, plaisantent.




Le marché principal que l’on nomme ʺle marche TOLEʺ est un marché tout en cris, rires, musique, un assortiment de parfums épicés, acidulés qui se mélangent avec les odeurs de fruits surets.


Déambulant dans les ruelles de la vieille ville, je retrouve mes voisins, les connaissances, les enfants, toujours aussi agiles sur leur vélo. Ils sont heureux de me montrer qu’ils ont depuis mon départ fait des progrès en pirouettes, sauts et autres figures compliquées. 





Un autre groupe faisant des figures avec un ballon, me fait une passe pour que je lui renvoie, afin de juger de ma force de frappe. Moment de grande détente et d’éclats de rire.





Agadez attend avec impatience d’entrer au Patrimoine mondial.
Ma visite des maisons se poursuit. Avec quelques menus francs - nous sommes toujours en francs CFA – (monnaie de la colonisation) on refait une façade, on relève un mur – de quoi donner un semblant de bonne humeur à cette ville qui est en train de mourir faute de visites,  de touristes ou d’un regard complaisant - regard d’un amoureux d’architecture, 


Détails d'un plafond




 
Détails d'une porte










Malgré ces petits efforts,  les maisons du patrimoine continuent d’être squattées et les dégradations empirent de jour en jour. Personne ne prend conscience qu’un jour, on parlera d’Agadez au temps passé et il n’y aura plus de témoignages vivants pour raconter Agadez.
Nous sommes là pour constater - que pouvons nous y faire, alors que la pauvreté, la misère s’étalent au grand jour ?  
 

Porte d'entrée
Ce qui reste d'une maison













Qui a sensibilisé la population sur la beauté de la ville. Population qui ne comprend pas que nous passions autant de temps à regarder ce que les anciens ont construit.


Agadez - ville propre

Posons-nous les bonnes questions avant de pleurer sur le passé. C’est la complainte que nous fredonne les vieux assis sur le pas de leur porte.
Je continue ma déambulation dans les ruelles, saluant les uns, les autres….








Aujourd’hui, ce qui importe, c’est ce que je retiens de l’instant partagé avec les personnes que je côtoie à travers les ruelles de la vieille ville….Et je la regarde cette vieille ville…avec sa mosquée imposante !



 






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